Carte Blanche : le sexisme dans le viseur de Maedusa

Pour cette nouvelle Carte Blanche, Lyon Positif a eu le plaisir de rencontrer Noémie Fachan alias Maedusa, chez elle pour une interview exclusive. C’est en la filmant en train de dessiner, nous avons pu plonger dans son univers créatif, où le dessin devient un moyen d’exprimer des réflexions sur des sujets essentiels. À travers cet entretien, Noémie évoque son parcours personnel, son engagement féministe, ainsi que son travail quotidien pour réinventer la place des femmes dans la société du métier d’illustrateur.ice en général.

Maedusa : la Gorgone moderne qui défie le sexisme

Comme beaucoup, c’est quand on est face au vide qu’on se demande comment agir. C’est en pleine période de confinement que Noémie Fachan, autrice, illustratrice et dessinatrice de bande dessinée, décide de lancer son compte Instagram Maedusa. Sous les traits d’une Gorgone moderne, elle se réapproprie le mythe de Médusa pour aborder des sujets de société tels que le sexisme et la lutte contre le virilisme. Maedusa compte aujourd’hui une communauté de plus de 100 000 abonnés.

Plus qu’un personnage : elle est le symbole d’une révolte contre l’injustice. Traditionnellement perçue comme une femme en colère et souvent récupérée par les mouvements féministes, Maedusa à longtemps été diabolisé. Elle devient ici l’emblème d’une prise de pouvoir créative et engagée.

Une révolte née d’un choc au collège

Noémie se souvient du jour où elle a découvert le mythe de Médusa, encore au collège. Dans la version d’Ovide, Médusa est victime d’un viol par Poséidon dans le temple d’Athéna. Bien qu’elle soit la victime, c’est Médusa qui est punie, transformée en monstre avec des cheveux de serpents et un regard pétrifiant.

Pour Noémie, Médusa incarne la légitime défense, loin des figures de pouvoir abusif “On se rend que le méchant ce n’est pas celui qu’on croit” explique-t-elle.

Dans ses dessins ou sur Instagram, elle actualise même l’expression : « Gorgon.es » et désigne toutes les personnes qui subissent les oppressions sexistes, qu’il s’agisse des femmes, des minorités de genre, ou des personnes perçues comme femmes.

Une lutte qui s’étend au-delà d’Instagram

Mais l’engagement de Noémie ne se limite pas aux réseaux sociaux. Elle organise également des ateliers et des conférences dans des entreprises et des écoles pour sensibiliser aux effets du sexisme ordinaire et proposer des moyens de lutter contre ce fléau. En utilisant le mythe de Médusa dans ses interventions, elle démontre que des problématiques contemporaines comme le consentement et l’invisibilisation du travail des femmes ont des racines profondes dans notre culture et notre imaginaire collectif.

La convergence des luttes, jusqu’au statut

En plus de son engagement féministe, Noémie Fachan milite activement pour la reconnaissance d’un statut européen de l’artiste-auteur. Ce statut vise à offrir une protection sociale et juridique aux créateurs et créatrices, souvent précaires et mal rémunérés. Actuellement, la législation autour des droits des artistes varie d’un pays à l’autre, créant des inégalités et des incertitudes pour celles et ceux qui vivent de leur art. Ce statut permettrait d’harmoniser les conditions de travail des auteurs et illustrateurs en Europe, garantissant des droits essentiels comme l’accès à une couverture santé, une retraite et une rémunération juste pour leur travail. Pour Noémie, cette lutte est cruciale afin de valoriser le travail créatif et de permettre aux artistes de vivre dignement de leur art, sans être soumis à une précarité constante.