Si l’on vous demande ce qui rend une piste cyclable adaptée ou pas, vous penserez probablement d’abord à sa largeur. C’est vrai, mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. À Lyon, l’association La Ville à Vélo, qui milite pour la promotion de l’usage du vélo et l’amélioration des infrastructures cyclables, se penche régulièrement sur ces questions. Alors que des discussions continuent avec la Métropole, de nombreux changements doivent encore être apportés pour garantir à toutes et tous des déplacements à vélo en toute sécurité, y compris pour ceux qui utilisent des vélos adaptés à des besoins spécifiques ou des handicaps. Ces vélos, essentiels pour certains usagers, apportent de vraies solutions de mobilité, mais cela ne vas pas sans difficultés. Pour mieux s’en rendre compte, nous avons suivi Pauline, Nathan et Myriam pour mieux comprendre les défis quotidiens qu’ils rencontrent avec leurs vélos adaptés.
Le vélo adapté : une solution de mobilité encore inaccessible pour certains
Au cours de cette matinée, nous avons rencontré Pauline, bénévole à La Ville à Vélo, qui nous a immédiatement fait tester les vélos adaptés : « Pour comprendre, il faut absolument essayer par soi-même ». Pauline nous a partagé son histoire. Avec son hémiparésie, un affaiblissement partiel de la force musculaire, son épilepsie et ses troubles cognitifs, son déplacement quotidien est souvent complexe. La découverte du vélo adapté a été une révélation pour elle, car elle avait toujours pensé que le vélo n’était qu’un loisir de vacances, et non un véritable moyen de mobilité quotidienne. Grâce à ce vélo, son quotidien a changé et s’est grandement simplifié. Elle a gagné 40 minutes environ sur son temps de trajet effectué auparavant en fauteuil roulant tout en améliorant son confort de vie et en lui permettant de maintenir une activité physique régulière.
Pour de nombreuses personnes, le vélo adapté représente donc une solution précieuse, surtout avec la diversité des modèles disponibles : tricycles, vélo-pousseurs, handbike, vélos-tandems, et bien d’autres encore, chacun doté de fonctionnalités spécifiques selon les besoins : changement de vitesse automatique, roues stabilisatrices, dispositifs de maintien…
Même si le premier frein est bien le coût des vélos adaptés, souvent élevé (les prix varient entre 600 € et 9 800 €) la Métropole offre une aide financière allant de 200 € à 1 000 € pour l’achat d’un vélo adapté neuf ou d’occasion pour les personnes en situation de handicap ou à mobilité réduite.
La seconde piste d’action est l’inadaptation de certaines pistes cyclables à ces équipements spécifiques. On parle souvent en premier de la largeur des pistes, mais l’inclinaison du dévers, conçu pour l’écoulement des eaux, constitue également un danger. En effet, pour les personnes en situation de handicap, un manque de stabilité peut rendre difficile le maintien de leur véhicule, voire occasionner des chutes, ce qui les oblige à une vigilance constante. On peut aussi évoquer la présence de poteaux installés le long des trottoirs, qui sont là pour protéger les piétons des voitures, mais qui compliquent la visibilité et la circulation des cyclistes, surtout ceux utilisant des vélos adaptés.
La pratique du vélo offre de nombreux bienfaits du vélo pour les personnes
Le vélo offre de nombreux avantages aux personnes en situation de handicap, tant sur le plan physique que mental et ces bienfaits sont bien connus de Nathan Payet, médecin généraliste et bénévole à La Ville à Vélo depuis deux ans.
Le point de départ de son engagement dans l’association, survient après avoir été confronté à plusieurs altercations avec des automobilistes : menaces, accélérations dangereuses et intimidations. Les cyclistes sont souvent victimes de stigmatisation, accusés de rouler n’importe comment, ou de griller les feux rouges. Les torts sont parfois partagés, mais ce qui est certain, c’est que ce difficile partage des usages tourne encore à l’avantage des voitures.
Nathan a rapidement réalisé que cette difficulté de cohabitation peut entraîner de réels dangers pour les cyclistes alors même que sa pratique a de nombreux avantages pour la santé.
C’est grâce à La Ville à Vélo qu’il a découvert les vélos adaptés et la grande diversité de modèles disponibles. Il a aussi constaté que ce type de vélo répondait à une problématique courante chez ses patients, qui souhaitent reprendre une activité physique, mais sont freinés par des douleurs ou une mobilité réduite et que cela pouvait permettre de retrouver une activité sans subir le poids du corps ni endurer de grandes douleurs.
La pratique du vélo répond enfin aux besoins de nombreux publics : des seniors en perte de mobilité, des personnes avec un handicap moteur partiel, ou encore des personnes malvoyantes, qui peuvent utiliser un tandem avec un accompagnateur.
Enfin, et c’est clairement documenté, la pratique régulière du vélo est un enjeu de santé publique notamment en ce qui concerne la réduction de la pollution de l’air et de la pollution sonore. Deux facteurs de détérioration de la santé bien connus, dont les effets (notamment pour les particules fines) peuvent être plus graves que ceux du tabagisme passif, mais qui sont sous-estimés de manière systématique du fait de la “moto normativité”. Un concept forgé par deux chercheurs anglais en psychologie Ian Walker et Alan Tapp, qui ont démontré que de nombreux biais culturels inconscients façonnent notre perception des impacts de la voiture en les sous-estimant justement parce que la voiture est perçue comme indispensable.